Appel à article pour le N°32, intitulé “Le travail bénévole” (Parution : Automne 2021), sous la direction de
Nicolas Da Silva et Pascale Molinier.
Argument
Travail militant, travail associatif, travail syndical, pair-aidance, stages non rémunérés, les formes du travail bénévole sont nombreuses et concernent des populations variées, le bénévolat venant scander des itinéraires de chômeurs, retraités, étudiants, salariés mais aussi de personnes concernées, par une maladie chronique ou un stigmate, de salariés venant chercher du sens dans une autre activité que celle pour laquelle ils ou elles sont rémunérées. Le travail bénévole est ainsi sur le fil du rasoir entre la gratuité du don, l’autonomie militante, les marges de créativité autorisées, d’un côté ; l’instrumentalisation et l’exploitation des « bonnes volontés » au détriment de la qualité des emplois, de l’autre côté.
L’approche du bénévolat dans ce numéro se veut pluridisciplinaire. La question du coût du travail convoque l’économie, celle de la division des tâches entre salariés et bénévoles, les sciences du travail et de la gestion, celle de l’engagement et des idéaux mobilisés, la psychosociologie et la psychanalyse notamment.
Du point de vue du travail, « l’idéologie du secteur associatif, fondée sur l’invocation du désintéressement et du don de soi et dont les bénévoles sont souvent les gardiens du temple, peut parfois servir d’alibi pour occulter la violence inhérente aux rapports salariaux » (Hély, 2008). Le travail bénévole n’est pas toujours choisi, notamment lorsque les activités bénévoles remplacent le désengagement de l’Etat (Simonet, 2018). L’invisibilisation du travail gratuit et de l’exploitation des bénévoles fait échos aux études de genre et à la place du travail des femmes dans les sociétés patriarcales (Revue de la Régulation, 2019, numéro 17 de la NRP). L’enjeu de la reconnaissance matérielle et symbolique du travail des femmes conduit de nombreux auteurs à recommander la prise en compte du travail domestique dans le Produit intérieur brut. Ces différentes situations, le travail bénévole ou le travail gratuit – deux concepts à différencier ? – donnent à voir les contradictions du travail qui relèvent d’une logique capitaliste : payer, c’est marchandiser (les affects, l’engagement citoyen…), et ne pas payer, c’est exploiter. Mais le travail bénévole interroge également les limites de la quantification du travail. Peut-on quantifier le sourire du bénévole ? Faut-il le rémunérer ? Est-ce que ce sourire rémunéré à la même signification qu’un sourire non rémunéré ?
Et si la simple recherche de maximisation du profit monétaire n’explique pas la motivation bénévole, ce sont donc des idéaux, des valeurs, mais aussi la recherche d’un plaisir ou d’une satisfaction, voir un intérêt secondaire (comme dans le cas des stages « professionnalisant ») qui orientent l’engagement dans le travail. Mais alors quelles en sont les incidences ? Sur la santé mentale des personnes ? Sur les relations entre bénévoles et salariés qui exercent dans les mêmes institutions ? Sur l’organisation du travail et son contenu même ? Et pourquoi, par exemple, rémunérer davantage une infirmière ou une institutrice si elles tirent de leur activité une satisfaction non monétaire ?
Les contributions proposées pour ce dossier prendront appui sur des expériences de terrain
et/ou des approches théoriques et devront présenter une analyse qui problématise les tensions
caractéristiques du travail non rémunéré, dans ses dimensions psychiques, sociales ou
économiques mais aussi anthropologiques ou historiques ou à partir d’une réflexion qui met
en regard plusieurs de ces dimensions.
Bibliographie
Hély M. (2010), « À travail égal, salaire inégal : ce que travailler dans le secteur associatif veut dire », Sociétés contemporaines, Volume 69, Numéro 1, pp. 125-147.
Simonet M. (2018), Travail gratuit : la nouvelle exploitation ?, Textuel, Paris.
Revue de la Régulation (2019), Déployer les études de genre en économie politique, numéro spécial, Numéro 25, 1er semestre.
Le genre, représentations et réalités. Nouvelle revue de psychosociologie 2014/1
Échéancier
Les projets d’article (une à deux pages maximum) sont à adresser avant le 16 octobre 2020 aux personnes suivantes :
A/ Nicolas da Silva : niconds@hotmail.fr, Pascale Molinier : pascalemolinier@gmail.com (coordinateurs du
numéro 31) ; Gilles Arnaud : garnaud@escp.eu, Florence Giust-Desprairies : giustdesprairies@wanadoo.fr
(rédacteurs en chef de la NRP)
CC/ Secrétaire de rédaction, Caroline Terrasse : revue-nrp@cirfip.org
Si votre proposition est retenue, les articles complets devront être remis au plus tard le 29 janvier 2021.