Soutenance de thèse de Séverine Ringanadepoulle
Sous la direction de Thierry Baubet, PU-PH, USPN
Titre de la thèse
« Faire corps au travail hospitalo-universitaire, les enjeux de la coopération au travail pendant l’internat en médecine »
Résumé
L’objectif principal de la thèse vise à investiguer le compagnonnage médical par l’approche psychodynamique du travail. Durant l’internat, les internes en médecine doivent s’intégrer aux équipes soignantes tous les six mois. Cette itinérance participe de l’incorporation d’un genre hospitalo-universitaire (au sens d’Yves Clot) constitutif de l’ethos médical. L’intégration des règles et des défenses collectives permet de réaliser le soin en se confrontant avec les contraintes inhérentes au corps-à-corps avec les malades mais aussi avec celles des conditions de travail hospitalo-universitaire.
C’est en reconstituant d’abord les histoires de l’apprentissage et de l’internat en médecine que cette recherche réussit à dresser quelques conclusions sur les articulations entre le travail médical, son apprentissage et la santé mentale sous-jacentes aux conduites viriles en salles de garde. La recherche doctorale a ensuite investigué six services hospitalo-universitaires grâce au déploiement d’une méthode combinée ethnographique et discursive, et invitant la chercheuse à elle-même faire corps avec l’hôpital. La méthodologie produit des descriptions détaillées des situations de travail intriquant la mission d’enseignement à celle du soin ; celles-ci sont croisées avec des paroles recueillies sur les vécus subjectifs de la coopération au travail pendant l’internat en médecine.
Les résultats de la thèse montrent que l’ascétisme des six premières années de formation des médecins se dote d’un activisme pour ne pas faillir. Depuis la fin du folklore carabin en salle de garde, l’ethos défensif se décline de moins en moins sur un mode viril mais suggère néanmoins l’intégration de normes défensives de métier s’implémentant dès les premières années d’apprentissage et sélectionnant les internes sur leur disposition à incorporer le caractère sacerdotal du travail hospitalo-universitaire. Les fonctions de l’internat en médecine répondent principalement à l’acquisition d’un genre hospitalo-universitaire dédié au maintien de la permanence des soins et nécessitant l’adhésion à des stratégies défensives partagées. Essentielles au maintien de l’engagement au travail, ces stratégies collectives de défense font émerger de l’isolement et des situations à risque pour celles et ceux qui n’en bénéficient plus ou pas. Enfin, ce travail d’articulation du travail médical et de la santé-mentale propose des pistes d’interprétation du sadisme inhérent aux situations de maltraitances faites aux étudiants et aux étudiantes en santé, en l’analysant du point de vue de ce qui se retrouve précipité dans l’évolution croissante de conditions de travail délétères. Ainsi, la souffrance des internes en médecine doit aussi éclairer celle des équipes soignantes qui les accueillent. La clinique hospitalo-universitaire réunit plusieurs corps coopérant autour de celui vers qui le soin se dirige. Les résultats soutiennent la thèse selon laquelle toutes les discussions collectives autour du soin ne peuvent plus faire l’économie des considérations autour de celles et ceux qui apprennent encore à soigner. « On apprend la médecine dans la douleur » mais on n’apprend jamais seul.
Mots-clés : internes en médecine, psychodynamique du travail, compagnonnage, organisation du travail, souffrance, santé mentale
Membres du jury
- Florent SCHEPENS, Professeur des universités (LaSA – Université de Bourgogne Franche-Comte)
- Mi-Kyung YI, Professeure des universités (CRPMS – Université Paris Cité)
- Emmanuel MARTINOD, Professeur des universités – Praticien Hospitalier (H&P –Université Sorbonne Paris Nord)
- Dominique LHUILIER, Professeure Emérite (CRTD – CNAM)
- Thierry BAUBET, Professeur des universités – praticien hospitalier (UTRPP – Université Sorbonne Paris Nord)
- Pascale MOLINIER, Professeure des universités (UTRPP – Université Sorbonne Paris Nord)
La soutenance sera suivie d’un pot salle 1.141 (inscription par mail : natacha.ramin@gmail.com)
